Aurores boréales méridionales

article original publié par Science @ Nasa
auteur : Docteur Tony Phillips
traduction de Didier Jamet
6 DECEMBRE 2003

Aurores boréales au-dessus de Myrtle Beach, en Caroline du Sud, le 20 novembre 2003
Aurores boréales au-dessus de Myrtle Beach, en Caroline du Sud, le 20 novembre 2003

Jim reed

Le 20 novembre dernier, une modeste éruption solaire a réussi à déclencher de splendides aurores boréales dans des lieux inattendus. Voici pourquoi

Le Photographe Jim Reed n’en crut d’abord pas ses yeux. Le Soleil venait de se coucher sur la Caroline du Sud le jeudi 20 novembre, mais le ciel, loin de s’assombrir, se para de vert et de rouge. C’était une aurore boréale s’aventurant au-dessus des lumières de la ville de Myrtle Beach.

" J’ai continué à marcher vers l’est pour mieux l’observer jusqu’à ce que je finisse littéralement dans l’Atlantique " se souvient-il. " A un moment, on pouvait voir la lumière des aurores se réfléchir sur le sable de la plage. C’était extraordinaire ! Avoir pu fixer sur la pellicule ce magnifique spectacle tout en ayant en fond sonore les vagues déferlant sur la plage fut un moment exceptionnel que je n’oublierai pas de sitôt. "

Plus au sud, à Huntsville, Alabama, le physicien David Hathaway était en train de regarder le journal télévisé lorsque le présentateur de la météo annonça que des aurores étaient visibles dans la région. " Je n’y ai tout d’abord pas cru " concède Hathaway, qui ne prit même pas la peine de sortir pour vérifier. " C’est tellement rare en Alabama ".

Mais il y en avait bien. En fait, durant un orage géomagnétique intense, les aurores peuvent apparaître presque n’importe où, et pas simplement en Alaska ou au Canada, là où on les trouve généralement en Amérique du nord. Et ce fut le cas le 20 novembre. Les gens aux Etats-Unis virent des aurores dans tous les états, excepté Hawaii.

L’orage géomagnétique a débuté quand une éjection de matière coronale a balayé la Terre. Ces éjections sont des nuages de gaz représentant plusieurs milliards de tonnes de matière précipités dans l’espace par des explosions à la surface du Soleil. Quand ce gaz s’abat sur le champ magnétique terrestre, il y a de fortes chances pour que des aurores se produisent.

" L’éjection de matière coronale du 20 novembre était finalement assez quelconque, ce qui est curieux lorsqu’on considère ce qui s’est passé ensuite " fait remarque Hathaway.

Le nuage de gaz a été éjecté dans l’espace par une explosion de classe M4 le 18 novembre dernier, près de la tache solaire 501, une région active qui a déjà fait parler d’elle en octobre dernier. Mais dans ce cas cependant, l’explosion ne fut pas particulièrement intense, comme en témoigne son classement en type " M ", soit moyen, dix fois plus faible que les éruptions de classe X tant redoutées par les opérateurs de satellites et les compagnies d’électricité. Des évènements de classe M, il s’en produit peut-être une bonne dizaine par mois, autant dire qu’elles sont ordinaires. Et pourtant celle-ci déclencha un orage magnétique hors du commun. Pourquoi donc ?

Hathaway nous l’explique : le champ magnétique terrestre agit comme un parapluie, il nous protège des colères du Soleil. Mais les éjections de matière coronale peuvent tout de même déchirer par endroits ce parapluie. En effet les nuages de gaz ionisé ont leur propre champ magnétique, et si ce dernier est incliné en sens opposé à celui de notre planète, ils vont s’annuler. On se retrouve donc avec une déchirure dans le parapluie, au travers de laquelle l’énergie du vent solaire se déverse. "

C’est exactement ce qui s’est produit le 20 novembre. Dans le sillage du nuage se baladait un champ magnétique orienté au sud et d’une intensité de 50 nano tesla, soit 5 à 10 fois supérieure à la normale. Les défenses magnétiques de notre planète se sont trouvées de la sorte littéralement battues en brèches, d’où l’extraordinaire intensité de l’orage géomagnétique résultant.

Les satellite Image (Nasa) et Cluster (ESA) ont récemment observé ces failles géomagnétiques provoquées par les éjections de matière coronale. Certaines sont aussi grandes que la Californie et peuvent se prolonger pendant plusieurs heures. Le vent solaire s’y engouffre, le champ magnétique de notre planète ploie, et les aurores apparaissent à des endroits où elles sont rarement visibles.

" Bien sûr " fait remarquer Hathaway, " ce n’est pas si fréquent que les aurores soient visibles jusqu’en Alabama… mais parfois ça arrive ". Et, bonne nouvelle pour les amoureux du ciel, pas besoin d’une éruption solaire surpuissante pour cela.

" La prochaine fois " avoue le chercheur, " je mettrai le nez dehors sans faute ".

Ne manquez pas la galerie d’images des aurores du 20 novembre, où vous verrez des centaines d’images prises à travers le monde.

Quelques liens

Le Soleil devient-il fou ?

Failles dans le champ magnétique terrestre.

La mère des tempêtes magnétiques

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