Mars en vue !

article original publié par Science @ Nasa
auteur : Docteur Tony Phillips
traduction de Didier Jamet
28 MAI 2005

le 12 août 2003, deux semaines avant son passage à l’opposition, Mars, sur la gauche de l’image, tenta bien vainement de rivaliser d’éclat avec la pleine Lune. Au matin du 31 mai, elle se trouvera en concurrence avec un croissant beaucoup plus modeste.
le 12 août 2003, deux semaines avant son passage à l’opposition, Mars, sur la gauche de l’image, tenta bien vainement de rivaliser d’éclat avec la pleine Lune. Au matin du 31 mai, elle se trouvera en concurrence avec un croissant beaucoup plus modeste.

Laurent Laveder

La Terre et Mars sont en route pour un époustouflant rendez-vous programmé en octobre 2005. Tenez-vous prêts, et ne manquez pas l’avant-première du mardi matin 31 mai 2005.

Lorsque vous serez parvenu au point final de cette phrase, vous vous retrouverez 40 km plus près de Mars que vous n’en étiez à son début.

En effet, dans sa course autour du Soleil, la Terre vous emmène avec elle en direction de son prochain rendez-vous avec la planète rouge à la vitesse faramineuse de 37 000 km/h. Même si vous êtes en ce moment tranquillement installé devant votre ordinateur, chaque minute qui passe vous rapproche un peu plus de Mars. En octobre, quand les deux planètes se trouveront au plus près l’une de l’autre, Mars sera l’objet le plus brillant du ciel nocturne, à l’exception notable de la Lune. Tiens, vous venez encore de vous rapprocher de 80 kilomètres ! Continuez à lire !

Bien que nous ne soyons encore qu’à la fin mai, Mars est déjà très bien visible dans le ciel matinal. Vous pouvez la voir se lever avant le lever du Soleil, au-dessus de l’horizon est, à peu près deux fois plus brillante que les étoiles du chariot de la Grande Ourse. Sur la carte ci-contre, vous verrez ou trouver Mars au matin du 31 mai 2005, date à laquelle elle aura la bon goût de se tenir tout près de la Lune.

Pourquoi nous ruons nous ainsi vers Mars ? Simple question de mécanique céleste. Imaginez que Mars et la Terre soient deux sprinters à la course dans un stade olympique, chacun occupant un couloir différent. Le couloir, c’est bien sûr l’orbite de chaque planète autour du Soleil. Contrairement à ce qui se passe dans un stade, où la ligne de départ est décalée sur chaque couloir afin de ne pas favoriser celui qui tient la corde, la Terre a un avantage certain dans cette course. En effet, plus une planète est proche du Soleil, moins elle a de distance à parcourir, et plus elle va vite. C’est ce qu’on appelle la troisième loi de Kepler. La Terre, plus proche du Soleil que Mars, n’a besoin que de 12 mois pour boucler un tour de piste autour du Soleil. Mars, avançant d’un pas lourd sur une orbite plus lointaine, prend presque exactement deux fois plus de temps. Si bien que, tous les deux ans à peu près, la Terre rattrape Mars et lui met un tour dans la vue, à la vitesse relative de 37 000 km/h. On dit alors que Mars est " à l’opposition ", c’est à dire exactement à l’opposé du Soleil dans le ciel.

Mars a encore pas mal d’avance sur nous, puisque nous ne la rattraperons pas avant l’automne, le 30 octobre à 03 h 19 Temps Universel pour être précis. À ce moment précis, nous ne serons séparés de la planète rouge que par 69 millions de kilomètres, à comparer à une distance moyenne de 250 millions. La période qui s’ouvre à présent représente donc le moment idéal pour lancer une sonde spatiale à destination de notre voisine.

Bien consciente de cette opportunité, la NASA, l’agence spatiale américaine, a justement prévu de lancer la mission Mars Reconnaissance Orbiter (MRO) le 10 août 2005. Comme le voyage vers Mars dure environ 6 mois, le meilleur moment pour effecteur le lancement intervient environ un mois avant la date de plus grande approche. MRO arrivera à destination en mars 2006, se placera en orbite, et débutera une mission de cartographie à haute résolution qui devrait durer pas moins de deux ans.

Les appareils de prise de vue à haute résolution de MRO seront capables de discerner des détails de l’ordre du mètre à la surface de Mars. Autant dire que pas un seul des vestiges de la conquête spatiale présent sur le sol de la planète rouge ne pourra échapper à son œil perçant. Un radar sondera en outre les profondeurs du sous-sol martien, dans l’espoir d’y détecter de l’eau, ce que la sonde Mars Express sera peut-être parvenue à démontrer auparavant. Des spectromètres obtiendront quant à eux une cartographie de répartition des minéraux à la surface de notre voisine. Enfin, certains instruments s’essayeront à la collecte de renseignements sur la météo martienne, les prévisions de son évolution revêtant une importance primordiale dans la perspective d’un futur débarquement humain sur Mars.

Actuellement, deux robots automobiles, Spirit et Opportunity, sont déjà à pied d’œuvre sur Mars. Ils y sont depuis janvier 2004, ayant tiré profit de la précédente opposition martienne d’août 2003. (souvenez-vous, ça se produit tous les deux ans). Les deux robots avaient une espérance de vie initiale de quelques mois, or cela fera bientôt un an et demi qu’ils déjouent les pièges de sable de Mars. Un succès à porter au crédit des ingénieurs de la Nasa. S’ils continuent sur leur lancée, ils devraient être encore en état de marche lorsque MRO viendra les rejoindre. Ils le verront comme un minuscule point lumineux dans le ciel martien, tandis que MRO cartographiera la planète rouge pour le compte de ses futurs explorateurs.

Ici sur Terre, on va pouvoir se régaler du spectacle consistant à voir Mars grossir de jour en jour dans l’oculaire des télescopes. Au cœur de l’été, il devrait être possible de repérer les calottes polaires ainsi que les tempêtes de sable. Et à l’automne, même l’individu le moins attentif aux spectacles du ciel ne pourra manquer de remarquer " cette brillante chose rouge dans le ciel ".

Retenez bien la date du 31 octobre comme étant celle du meilleur moment pour observer Mars, si le temps le permet. Mars se lèvera dès le coucher du Soleil, se tiendra au plus haut dans le ciel vers minuit, et se couchera à l’ouest aux aurores. Vous pourrez donc l’admirer toute la nuit, " flamboyant sur fond de noirceur sidérale avec une splendeur dépassant celle de Sirius et rivalisant avec celle de Jupiter elle-même ". C’est du moins ainsi que l’astronome Percival Lovell la décrivit lors d’une opposition qu’il eut l’occasion d’observer au 19e siècle.

Vous n’y tenez déjà plus ? Ne vous impatientez pas trop. Vous pourrez observer Mars dès cet été, tous les matins avant l’aube. Et ce mardi 31 mai, vers 04 h 30, Mars vous apportera un gros croissant lunaire pour vous remercier de vous être levé si tôt afin de l’admirer.

Et une dernière bonne nouvelle pour finir. En lisant ce texte jusqu’au bout, vous vous êtes encore rapproché de 1600 km de la planète rouge !

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