Autour de la Terre, une intelligence se développe

article original publié par Science @ Nasa
auteur : Docteur Tony Phillips
traduction de Didier Jamet
30 OCTOBRE 2006

Image satellite du volcan Merapi surmonté d\'un panache de fumée. Typiquement le genre d\'évènement que EO-1 est en mesure de repérer et auquel il peut adapter ses priorités
Image satellite du volcan Merapi surmonté d'un panache de fumée. Typiquement le genre d'évènement que EO-1 est en mesure de repérer et auquel il peut adapter ses priorités

Nasa

Le volcan indonésien Talang, sur l’île de Sumatra, dormait depuis des siècles lorsque soudainement, en avril 2005, il s’est bruyamment réveillé. Un panache de fumée s’est élevé à un kilomètre d’altitude, et les villages environnants ont été recouverts de cendres. Craignant une éruption majeure, les autorités locales commencèrent à évacuer 40 000 personnes. Dans le même temps, les Nations Unies lancèrent un appel à l’aide : les vulcanologues devaient immédiatement commencer à surveiller Talang.

Les Nations Unies n’étaient pas du tout au courant du fait que, bien au-dessus de la Terre, un petit satellite s’était déjà mis au travail et observait le volcan. Le plus fort, c’est que personne ne lui avait dit de le faire. EO-1 (Earth Observing 1) avait remarqué les signes avant-coureurs et commencé à surveiller Talang de sa propre initiative.

De fait, le temps que la plupart des vulcanologues aient lu le courrier électronique des Nations Unies, « EO-1 avait déjà enregistré des données » confirme Steve Chien, qui dirige le groupe d’intelligence artificielle du JPL.

EO-1 fait partie d’une nouvelle génération de satellites qui peuvent penser par eux-mêmes. « Nous l’avons programmé pour détecter les changements (comme l’apparition d’un panache de fumée au-dessus d’un volcan) et prendre des initiatives appropriées » explique Chien. EO-1 peut ainsi modifier l’ordre de ses priorités pour étudier des éruptions volcaniques, des inondations catastrophiques, des feux de forêt, ou des ruptures de banquise. En fait, il sait faire face à l’inattendu.

S’agit-il pour autant d’une véritable forme d’intelligence ? « Absolument » répond catégoriquement Chien. EO-1 passe avec succès le test fondamental de l’intelligence. « Si vous le placez dans une boite et observez ses réactions depuis l’extérieur, sans savoir comment il prend ses décisions, diriez-vous que ce qui est dans la boite est intelligent ? » Chien en est persuadé.

Et à présent, cette intelligence se développe. « Nous apprenons à EO-1 à se servir des capteurs d’autres satellites ». Un exemple concret : Terra et Aqua, deux satellites de la Nasa qui survolent chaque point de la Terre deux fois par jour. Chacun est équipé d’un capteur appelé MODIS. Il s’agit d’un spectromètre infrarouge capable de détecter la chaleur des feux de forêt et des volcans en éruption, justement le genre d’évènement que EO-1 aime bien étudier. « Nous fournissons à EO-1 les données de MODIS » précise Chien, aussi « lorsque Terra ou Aqua observe quelque chose d’intéressant, EO-1 peut réagir. »

Mais EO-1 ne s’arrête pas là, puisqu’il peut aussi s’approvisionner aux sources des capteurs terrestres, comme « le réseau d’observatoires volcaniques du service géologique américain USGS réparti entre Hawaii, Washington et l’Antarctique. » Ensemble, les stations au sol et les satellites forment une toile d’araignée de capteurs au centre de laquelle se trouve EO-1, regroupant les données et prenant les décisions. Cette nouvelle façon d’étudier la Terre recèle d’immenses potentialités.

Chien Prédit que les réseaux de capteurs vont peu à peu devenir disponibles également autour d’autres planètes. Prenez Mars par exemple : « Nous avons actuellement quatre satellites en orbite martienne, et deux robots automobiles au sol. Ils pourraient travailler ensemble. » Imaginez qu’un satellite repère une tempête de poussières en train de se lever. Il pourrait alors indiquer aux autres de suivre cette tempête lorsqu’ils seront amenés à la survoler, et donner aussi l’alerte aux robots, voire aux explorateurs humains – Attention, une tempête arrive !

Sur la Lune, Chien imagine carrément des essaims de robots automobiles parcourant la surface lunaire. Que se passerait-il si un des robots tombait sur un dépôt prometteur de minerai ? Les autres pourraient être appelés en renfort, apportant sur zone des perceuses et autres outils spécialisés. Avec l’autonomie qu’apporte l’intelligence artificielle, ces robots ne nécessiteraient que très peu de supervision de leurs maîtres humains.

Un dernier exemple pour finir. Le Soleil. On compte à l’heure actuelle plus d’une demi-douzaine de satellites capables de suivre l’activité solaire d’une façon ou d’une autre, SOHO, ACE, GOES-12 et 13, Solar-B, TRACE, STEREO et d’autres. De futures missions viendront bientôt grossir ces rangs déjà fournis. « Si ces vaisseaux pouvaient être réunis au sein d’un maillage de capteurs, ils pourraient coordonner leurs actions pour étudier les éruptions solaires et fournir de meilleures informations aux astronautes sur la Lune et Mars » fait remarquer Chien.

Mais pour l’instant, l’intelligence artificielle reste confinée à la Terre. Le reste du système solaire patiente.

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