Les Astronautes ont le coup d’oeil

article original publié par Science @ Nasa
auteur : Docteur Tony Phillips
traduction de Didier Jamet
10 JUIN 2002

Cette photo a été prise au dessus de la mer des Caraïbes en 1994 par l’équipage de la navette spatiale. Elle révèle des panaches de poussières transatlantiques en provenance du Sahara
Cette photo a été prise au dessus de la mer des Caraïbes en 1994 par l’équipage de la navette spatiale. Elle révèle des panaches de poussières transatlantiques en provenance du Sahara

Nasa Visible Earth

Les scientifiques qui étudient la Terre adorent ça. « l’image de l’Everest prise par Dan en lumière rasante, aucun satellite d’observation ne peut vous la fournir » confirme Robinson.

Cela commence à devenir une habitude pour les astronautes de voir ce que les satellites ne voient pas. En 1994 par exemple, l’équipage de la navette spatiale Columbia (vol STS 65) remarqua un étrange brouillard au-dessus de la mer des Caraïbes.

On découvrit qu’il s’agissait d’un énorme nuage de poussières en provenance d’Afrique, transporté à des milliers de kilomètres du désert qui l’avait vu naître. A l’époque, bien peu de scientifiques avaient envisagé la possibilité qu’un tel phénomène puisse traverser l’Atlantique. Les satellites observant à la verticale n’avaient pas décelé le fin nuage, alors que les astronautes, de biais, l’avaient facilement repéré.

À présent nous savons que des nuages de poussières levés par les tempêtes du Sahara transportent microbes et allergènes jusqu’aux Amériques chaque été. Les nuages provoquent parfois des marées rouges, quand ils répandent au dessus des eaux des poussières chargées en minéraux, ils peuvent aussi endommager les récifs de coraux, et rendre malade les gens qui inhalent la poussière.

Sans la vigilance des astronautes et les images qu’ils ont prises, les scientifiques n’auraient peut être toujours pas compris l’origine des nombreux cas d’allergies et de marées rouges qui affectent les Caraïbes.

Observer la Terre depuis l’espace est considéré comme tellement important que les astronautes sont entraînés à le faire longtemps avant leur première mission. « Les candidats astronautes apprennent à mieux connaître la géologie, les sciences environnementales et la déforestation » précise Robinson. Ils apprennent également à utiliser le matériel. L’ISS embarque des enregistreurs vidéos, des appareils photo numériques, des appareils photo argentiques 35 et 70 mm, et les objectifs qui vont avec.

« Nous entraînons les astronautes à repérer ce qui sort de l’ordinaire – par exemple à chercher les reflets du Soleil » déclare Byrne. Les photographies de la lumière solaire réfléchie par les eaux océaniques peut révéler des courants inattendus, ou le sillage d’une île. « Le problème, c’est que les reflets solaires balayent rapidement la surface terrestre. Aussi, les astronautes disposent de seulement deux ou trois secondes pour réussir leur photo. »

Chaque semaine l’équipe de Byrne envoie des douzaines de demandes de photos à l’équipage de la station spatiale. Elles proviennent de scientifiques étudiant la Terre, et qui parmi d’autres choses veulent mieux comprendre les récifs de corail, l’urbanisation, la pollution, les glaciers ou les deltas fluviaux.

« Les requêtes que nous leur envoyons ne les mobilisent pas plus d’une demi-heure par jour au hublot » dit-il. « Nous recevons des milliers de photos de chaque mission – plus que nous n’en avons demandé. La plupart sont à l’initiative des astronautes qui, passant devant le hublot, observent quelque chose qui leur tire l’œil. C’est ainsi que se font des découvertes fortuites. »

« Nous ne cherchons pas à savoir combien de temps ils passent à regarder la Terre. Mais depuis l’époque du Skylab, nous savons que c’est bon pour leur moral» ajoute Byrne. Les astronautes travaillent énormément, dans un espace confiné. Regarder par le hublot les aide à décompresser.

Il y a des corvées plus désagréables que ces séances imposées de prises de vue : imaginez-vous flottant près du hublot, la Terre juste en dessous, l’appareil photo paré pour de nouvelles découvertes. Et si on loupe son objectif, on obtient quand même une magnifique photo…

Vous pouvez admirer les toutes dernières images prises depuis la Station Spatiale Internationale sur le Portail de la photographie astronautique de la NASA.

Certaines d’entre elles vous donneront l’impression de flotter… à la verticale de votre clavier d’ordinateur.

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